Alsace

A Guebwiller, toute la palette bleutée du céramiste Théodore Deck

La ville natale du fameux céramiste abrite, dans le musée qui porte son nom, la plus importante collection publique de ses faïences et plusieurs pièces « bleu Deck ». Le marché de Noël en a revêtu la couleur depuis ce samedi 30 novembre.

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Chat assis (Bastet). © Ville de Guebwiller/Musée Théodore Deck & des Pays du Florival / Pictural Colmar

En Europe, la seconde moitié du XIXe siècle est le théâtre d’un foisonnement extraordinaire dans les arts décoratifs. A l’instar d’autres formes d’expression, la céramique puise son inspiration dans les pièces exotiques que la mondialisation du commerce draine jusqu’au vieux continent, et s’épanouit avec l’industrialisation de la production. Parmi les grands maîtres des arts du feu figure Théodore Deck (1823-1891). A la fois artiste et entrepreneur, l’Alsacien exerce aussi sa créativité sur le plan technique. Son « bleu Deck » est passé à la postérité et Guebwiller, sa ville natale du sud Alsace, en a tiré parti. Elle a repeint son marché de l’Avent en « Noël bleu », dont la 16e édition se poursuit jusqu’au 5 janvier.

Un “bleu Deck” au pluriel

Si vous passez à Guebwiller pendant les semaines qui précèdent la Noël, ne vous contentez cependant pas d’assister aux spectacles et aux illuminations nocturnes des façades, dont celle de la vénérable église romane Saint-Léger, en véritable grès rose sous son nappage bleu. Car il y a bleu et « bleu Deck ». Ou, peut-être vaudrait-il mieux écrire, « bleus Deck ». Pour vous en rendre compte, réchauffez-vous avant la tombée de la nuit dans l’ancien Hôtel du doyenné, un bâtiment du XVIIIe siècle qui accueille aujourd’hui le musée Théodore Deck et des pays du Florival*. Vous y découvrirez plus d’une centaine d’œuvres sélectionnées parmi la plus grande collection publique de pièces du céramiste. Dans le foisonnement de thèmes, de formats, de prouesses techniques et de couleurs, les bleus tiennent une place à part.

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© Ville de Guebwiller/Musée Théodore Deck & des Pays du Florival

Grand Prix de l’Expo universelle

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, qui connaît un véritable engouement pour la céramique, une couleur fascine les spécialistes. C’est le « bleu persan » ou « bleu de ciel d’Égypte ». Outre ses reflets électriques, la teinte turquoise exerce un attrait particulier parce qu’elle est absente de la palette occidentale. Théodore Deck parvient à mettre au point un bleu qui s’en rapproche et qu’il décline en trois nuances, dont l’épaisseur de l’émail permet en sus de moduler la puissance.

Ce n’est pas la seule innovation du céramiste. Impressionné par les mosaïques vénitiennes sur fond doré, le Guebwillerois, qui a ouvert un atelier et s’est installé à Paris, développe une technique inédite où l’or s’applique sous la couverte (la glaçure qui recouvre la céramique). Cette découverte lui vaut le Grand prix de l’Exposition universelle de Paris, en 1878. Émerveillé par les grès flammés qu’il découvre au cours de ce rendez-vous international, il développe ensuite aussi des effets de glaçures qui s’en inspirent, comme les « sang-de-boeuf ».

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© Ville de Guebwiller/Musée Théodore Deck & des Pays du Florival / Pictural Colmar

Une Suissesse parmi les dessinateurs

La seconde partie du XIXe siècle est la période de l’industrialisation de la production, mais les séries continuent de coexister avec des pièces d’exception. L’exposition permanente rend bien compte de la variété des influences et des gestes qui traversent la céramique européenne à cette époque, à travers les œuvres de Deck. Aux premières pièces historicistes, inspirées par l’Antiquité ou la Renaissance, succèdent les assiettes à motifs naturalistes ottomans ou japonisant. Un vase de 1,4 m et une statue d’un peu plus de 2 m témoignent de la recherche de la virtuosité. Des décors muraux de paysage lacustres, qui habillaient une salle de bain et une véranda, ont été remontés. Théodore Deck a eu la particularité de faire signer les dessinateurs, parmi lesquels plusieurs femmes. On retrouve les œuvres de quelques-uns de ses créateurs favoris, dont la Suissesse Sophie Schaeppi, regroupées au troisième étage du musée.

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© Romain Gascon

Oeuvres contemporaines jusqu’au 22 décembre

Guebwiller n’a pas laissé le feu s’éteindre. Depuis 2002, la cité accueille l’Institut européen des arts céramiques (IEAC). Le musée expose quelques œuvres contemporaines et le château de la Neuenbourg contigu présente jusqu’au 22 décembre Eclats et lumière, qui rassemble des créations d’artistes passés par l’institut.

*L’entrée du musée est gratuite pendant la période du Noël bleu.

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© Romain Gascon

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