Lorraine

Grâce à Majorelle, l’Art nouveau nancéien fleurit jusqu’à Marrakech

En 1924, l’artiste nancéien Jacques Majorelle acquiert un terrain en lisière de la palmeraie de Marrakech pour y construire une villa et y planter un jardin. Racheté en 1980 par Pierre Berger et Yves Saint-Laurent, qui y firent édifier un musée chacun, le Jardin Majorelle est devenu le site culturel le plus fréquenté du Maroc.

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© Pascale Braun

A un quart d’heure à pied de la célèbre place Jamaah El Fina, épicentre touristique de Marrakech, une petite forêt urbaine cachée par de hauts murs ne désemplit pas. Au Jardin Majorelle, les palmier et bambous tutoient les 30 mètres de hauteur, les cactus géants fleurissent dans des jarres chatoyantes et tortues et carpes koï s’épanouissent dans un bassin bleu Majorelle. En toute saison, le site est pris d’assaut par des touristes venus admirer une collection botanique de plus de 300 espèces dans un jardin labyrinthique empreint à la fois des traditions hispano-mauresques et de l’Art Nouveau à Nancy.

Deux amoureux et deux musées

Les lieux ont conservé l’empreinte de ses anciens propriétaires, le peintre lorrain Jacques Majorelle dans les années 20, puis le couple d’Yves-Saint-Laurent (1936-2008) et de Pierre Bergé (1930-2017) quatre décennies plus tard. Les deux hommes y ont respectivement ancré le musée Pierre Bergé des arts berbères consacré à la culture amazighe et le musée Yves Saint Laurent Marrakech, dédié aux pièces du couturier et à des expositions temporaires. 

Au milieu du jardin, une stèle rend hommage aux deux hommes. Dernier compagnon de Pierre Bergé, le paysagiste Madison Cox, qui préside aujourd’hui la fondation Pierre Berger-Yves Saint-Laurent, a conforté la vocation touristique du site. Avec 800.000 visiteurs annuels en moyenne, le Jardin Majorelle s’est imposé comme la première destination muséale du Maroc.

Au milieu du jardin, une stèle rend hommage aux deux hommes

Dernier compagnon de Pierre Bergé, le paysagiste Madison Cox, qui préside aujourd’hui la fondation Pierre Berger-Yves Saint-Laurent, a conforté la vocation touristique du site. Avec 800.000 visiteurs annuels en moyenne, le Jardin Majorelle s’est imposé comme la première destination muséale du Maroc.

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© Pascale Braun

L’Art nouveau au Maroc

Cette oasis de nature n’avait pourtant pas vocation à s’ouvrir au public et a même failli disparaître. Fils unique de l’ébéniste nancéien Louis Majorelle, l’un des grands noms de l’Ecole de Nancy, Jacques Majorelle (1886-1962) s’est installé à Marrakech en 1917. Orientaliste amoureux du Maroc, dont il devient l’un des grands peintres, il est également épris de botanique. Dans le jardin de la villa qu’il a fait construire en 1924 dans un style Art déco, il cultive à profusion orangers, cocotiers, bananiers, yuccas, jasmins, bougainvilliers, fuchsias et autres cactus.

Bleu Majorelle

Il n’en ouvre l’accès au public qu’en 1947, pour subvenir aux frais d’entretien et financer une communauté carmélite voisine. A cette date, il a déjà repeint sa villa du bleu vibrant qui porte désormais son nom.

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© Pascale Braun

Mais un divorce, puis un grave accident de voiture, mettent fin aux années fastes du peintre, qui meurt à Paris et sera inhumé à Nancy. Faute d’entretien, le jardin se dégrade.  Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé découvrent le site en 1966, au cours de leur premier séjour à Marrakech.

Bergé

Pierre Bergé et Yves Saint Laurent en 1958. Photographie de Bernard Lipnitzki.© Roger Viollet.

 « Nous fûmes séduits par cette oasis où les couleurs de Matisse se mêlent à celles de la nature », a écrit Pierre Bergé

Le couple a acquis le jardin Majorelle en 1980 et y a engagé de grands travaux de restauration. Porté par les rétrospectives dédiées à Jacques Majorelle à Nancy et à l’Institut du Monde arabe de Paris en 2000, le site n’a cessé de gagner en popularité. Dans un pays clairement homophobe, dont le code pénal punit l’homosexualité, le jardin apparaît également comme une oasis de tolérance. Le site constitue de surcroît l’un des rares lieux accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Des tarifs éhontés

Son succès engendre néanmoins des arnaques. Le portail de réservation en ligne dysfonctionne souvent, conduisant les visiteurs à consulter des sites voisins parfaitement opérationnels, mais proposant des tarifs éhontés. Le site Viator ponctionne ainsi 45 euros pour la visite du seul jardin, contre un tarif de 180 dirhams (18 euros) pour le billet incluant le jardin et les deux musées au tarif officiellement applicable aux visiteurs internationaux, eux-mêmes plus élevés que pour les Marocains. Souvent aisés, les visiteurs, qui dépensent facilement 2.400 euros à la boutique du jardin pour un sac à main d’inspiration YSL ou une peinture anonyme, ne s’aperçoivent pas toujours qu’ils ont été grugés.

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